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Discours de Macron à l’Institut de France « pour la stratégie sur la langue française »,
compte rendu critique approfondi
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• 20 novembre 2022. J’ai regroupé sur cette page mes analyses du discours « pour la stratégie sur la langue française » du 20 mars 2018 de Macron à l’Institut de France.
« Chaque phrase est un désastre », écris-je quatre fois dans ce long compte rendu (environ 55 000 signes, soit autant que le discours lui-même), et c’est aujourd’hui, avec quatre ans de recul, le meilleur résumé que je puisse faire.
• 12 octobre 2018
Leçon 588. – Discours d’Emmanuel Macron à l’Institut de France*, compte rendu critique approfondi, 1/22
Nous avons découvert hier, avec retard, le discours catastrophique du président Emmanuel Macron à l’Institut de France « pour la stratégie sur la langue française » (sic) du 20 mars 2018 : une pluie d’ennui, de maladresses et de platitudes dont nous allons tenter de faire un compte rendu critique approfondi (corvée, mais vrai devoir citoyen et bon exercice) pour venir en compensation de certaines de nos analyses superficielles des propos de la même personne (voir la leçon 261 : « désespoir du peintre »).
En attendant, saluons la longanimité des auditeurs des premiers rangs qui victorieusement luttent pour ne pas s’endormir ou pour masquer leur ennui, voire un vif mécontentement : un discours de soixante minutes, de près de 55 000 signes.
Ci-dessus, une photo à quinze minutes de la fin : certains auditeurs sont parvenus à conserver un air inspiré ou intéressé jusqu’au bout. Bravo.
À droite au troisième rang, on reconnaît la Franco-Marocaine Leïla Slimani, représentante personnelle du président Emmanuel Macron pour la francophonie (Leïla Slimani : lire ici les leçons 388, 389, 392, 394, 395, 397, 398 et 400-404, qui comprennent une recension de son ouvrage Chanson douce, calamité littéraire – le scénario est acceptable, mais le style est un naufrage – primée en 2016 par les Goncourt).
À droite au premier rang, le rappeur franco-rwandais Gaël Faye, que le président appelle par erreur « Gabriel Faye » et dont il dit : « lui qui a montré à plusieurs reprises [c’est nous qui soulignons] qu’il sait parler et écrire le français »...
Une continuation du naufrage donc, même une tradition du naufrage.
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* http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/
Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
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• 14 octobre 2018
Leçon 590. – Discours d’Emmanuel Macron à l’Institut de France*, compte rendu critique approfondi, 2/22
Extrait :
On a torturé en français, on a fait des choses merveilleuses en français et on continue à faire des choses merveilleuses et terribles en français.
Un patient et sournois travail de sape et de dénigrement de la France qui se poursuit ; une critique suivie d’un éloge censé la minimiser, la faire oublier ou l’effacer ; stupéfiant et effroyable.
« Une critique suivie d’un éloge censé la minimiser, la faire oublier, l’effacer », écrivions-nous, mais c’est cette grotesque et extravagante formule, cette formule « de tous les excès », particulièrement prégnante, à l’emporte-pièce, propre au libelle qui reste et restera en mémoire : « On a torturé en français. »
Mise à jour, novembre 2022. Le coup de pied de l’âne, la flèche du Parthe, personne pour lui répondre. Il parle, il pérore devant un auditoire respectueux et muet trié sur le volet. Personne pour marmotter, personne pour s’écrier, personne pour se regimber : tout ricanement, toute protestation feraient scandale. La grande solitude, mais aussi le grand confort.
On remarquera dans le petit extrait photographique ci-dessus GREGOIRE au lieu de GRÉGOIRE, STETIE au lieu de STÉTIÉ ou, mieux, sans capitales inutiles qui font ressembler la transcription à un document de notaire, au lieu de Grégoire et de Stétié.
On remarquera aussi l’absence de ponctuations, comme ici :
... quitus[,] mais toujours au creux du français il y a eu[,] je crois[,] cette volonté de liberté[,] sans doute toujours inaccomplie...
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* Discours « pour la [sic] stratégie sur [sic] la langue française » prononcé le 20 mars 2018 : http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/
Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
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• 14 octobre 2018
Leçon 592. – Discours d’Emmanuel Macron à l’Institut de France*, compte rendu critique approfondi, 3/22
« Cette volonté de liberté[,] sans doute toujours inaccomplie », a dit, a lâché le président (voir la leçon 590 ci-dessus).
Voilà qui, dans cet océan de formules creuses, de formules faussement paternes et de caresses griffues, de platitudes et de maladresses de langue et de logique, voilà qui, disons-nous, est très pertinent, et très cynique : il n’y a aucun doute, ce n’est pas sous Emmanuel Macron que cette volonté de liberté des Français pourra s’accomplir, puisque la liberté leur est rognée chaque jour par mille et un moyens, par mille et un stratagèmes grossiers et plus ou moins scélérats – de plus en plus scélérats et de plus en plus nombreux.
Emmanuel Macron, un sabot de fer dans un chausson de velours.
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* Discours « pour la [sic] stratégie sur [sic] la langue française » prononcé le 20 mars 2018 : http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/
Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
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• 15 octobre 2018
Leçon 595. – Discours d’Emmanuel Macron à l’Institut de France*, compte rendu critique approfondi, 4/22
Extrait :
[La langue française] est aussi la langue des journalistes, des opposants, des blogueurs, des poètes, de tant et tant de pays où on se bat en français pour la liberté.
Truisme (« vérité banale et qui ne mérite pas d’être répétée », Littré).
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* Discours « pour la [sic] stratégie sur [sic] la langue française » prononcé le 20 mars 2018 : http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/
Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
• 15 octobre 2018
Leçon 596. – Discours d’Emmanuel Macron à l’Institut de France*, compte rendu critique approfondi, 5/22
L’oral, 1/2. (Ecouter la vidéo du discours.)
Prononciation idiosyncratique
— français, prononcé comme francé
— anglais, prononcé comme anglé
— Du Bellay, prononcé comme Du Bellé
— interpellé (graphie de la transcription sur Elysee.fr), prononcé comme interpelé (voir la leçon 597 ci-dessous)
— intimement, prononcé comme intimément (barbarisme)
— rehausser, prononcé comme réhausser (barbarisme)
— tâche, prononcé comme tache (voir aussi « mâle blanc » prononcé comme « mal blanc » dans la leçon 496)
Lapsus
— Abdou Diouf est appelé Abou Diouf
— Gaël Faye est appelé Gabriel Faye
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* Discours « pour la [sic] stratégie sur [sic] la langue française » prononcé le 20 mars 2018 : http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/
Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
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• 28 octobre 2018
Leçon 618. – Discours d’Emmanuel Macron à l’Institut de France*, compte rendu critique approfondi, 6/22
« Porter », le mot remplace-tout (donc paresseux et imprécis) et branchouille. Neuf fois :
— [la France est consciente de] ne pas porter seule le destin du français
— cette interprétation du monde que nous voulons et pouvons porter
— notre capacité à porter le français y compris dans des terres où notre langue a reculé
— c’est ce que dès la rentrée dernière le ministre de l’Education et la ministre de la Culture ont ensemble porté et que nous poursuivrons
— [un combat] porté par les élus
— cette exigence que nous portons sur notre territoire national, je veux la porter hors de nos frontières
— j’ai voulu que la France, dans l’action qu’elle mène à l’international, et nous l’avons constamment porté [sic ; mieux : portée] avec le ministre
— la ministre de la Culture aura à porter un texte important
Il reste beaucoup à dire sur ce discours, l’analyse et la présentation de l’analyse en sont fastidieuses et lentes ; certains problèmes en contiennent d’autres comme ces poupées russes (exemple : un problème de logique + un de syntaxe + un d’orthographe + un de ponctuation...). Gageure et corvée, mais citoyenne – comme disent les bonnes gens.
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* Discours « pour la [sic] stratégie sur [sic] la langue française » prononcé le 20 mars 2018 : http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/
Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
Mise à jour de janvier 2019
• René Chiche :
Entendu à l’instant dans la bouche de @GabrielAttal : "le service universel que je porte avec @jmblanquer...". Messieurs, contentez-vous de porter votre costume, votre saccoche [sic] et votre masque. Cet abus du verbe porter est insupportable !
https://twitter.com/rene_chiche/status/1090255044874620930
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• 29 octobre 2018
Leçon 620. – Discours d’Emmanuel Macron à l’Institut de France*, compte rendu critique approfondi, 7/22
L’oral, 2/2. (Ecouter la vidéo du discours.)
Diction
Nous avons parlé de la prononciation et des lapsus d’Emmanuel Macron dans la leçon 596 ci-dessus. Voici ci-après une description générale de la diction.
En alternance avec un ton normal : ton patelin, fortement paterne (paterne, donc sans le moindre rapport avec le sujet), confidentiel, voix de velours, le président nous parle comme à l’oreille ; pauses dues à l’émotion, il reprend ses esprits, se récollige (peut-être pour étouffer un sanglot) ; pauses de théâtre pour créer un effet de suspense ; petite voix faible (est-il au bord des larmes ?) ; ralentissement du débit (pour élever ou réveiller l’intérêt par un effet de contraste) ; puis quasi-trémolos finals (il se contient, il se retient, il tente de modérer une émotion qui le submerge) et protestations particulièrement outrancières de sa sincérité quand il parle de Colette et de Giono, moins de deux minutes avant la fin :
J’ai très sincèrement cru pouvoir décrire l’automne grâce à Colette et je peux vous dire tout de la chaleur des soirs de Provence parce que j’avais lu Giono.
Ecouter la citation (15 secondes).
« J’ai très sincèrement cru », « je peux vous dire tout » : Macron fait mine de s’épancher, la main sur son petit cœur. Les trémolos c’était très bien chez André Malraux, mais le texte avait de la puissance, il était adapté et adéquat à ces effets de voix.
D’autres mots nous viennent à l’esprit pour décrire cette diction : Sinatra de la politique... crooner... voix flexible et soyeuse... il ne parle pas, il caresse... il tente d’hypnotiser...
A propos de diction, voir aussi notre remarque de la leçon 496 :
[Macron est] dans la frimerie et la séduction (changement brusque, inattendu d’intonation pour se faire charmeur et confidentiel : c’est du théâtre, pas du tout rare chez Macron, la voix se fait plus grave et le débit est ralenti – exemple à 42 secondes : « elle nous conduit à changer de méthode »).
A signaler un problème de temps grammatical dans la citation, donc de logique : je peux/j’avais. (Peut-être l’émotion.)
Il nous faudrait parler aussi des mouvements du visage, de ceux de la tête, des bras et des jambes (invisibles, mais certains devinables), nous le ferons peut-être – nous avons peu de matière.
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* Discours « pour la [sic] stratégie sur [sic] la langue française » prononcé le 20 mars 2018 : http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/
Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
• 30 octobre 2018
Leçon 621. – Discours d’Emmanuel Macron à l’Institut de France*, compte rendu critique approfondi, 8/22
Chaque phrase est un désastre
Continuons : chaque phrase est un désastre. Difficile, par exemple, de ne pas être interpellé par la dernière phrase que nous avons citée ci-dessus en 620. Depuis hier, il persiste chez nous auditeur ou lecteur un sentiment de malaise et d’incompréhension, sentiment que nous allons ici expliquer. Revoici la phrase :
J’ai très sincèrement cru pouvoir décrire l’automne grâce à Colette et je peux vous dire tout de la chaleur des soirs de Provence parce que j’avais lu Giono.
« Je peux vous dire tout de la chaleur »... « Tout de la chaleur » ? mais il y a peu à dire ; grosso modo trois possibilités : soirs tièdes, chauds ou très chauds. Ensuite ?
Se vanter de pouvoir dire tout de très peu relève de la supercherie, de la fausse annonce, qui crée de la déception et un sentiment de profond ridicule.
Le président aurait pu déclarer : « Je peux vous dire tout des soirs de Provence » ; là il y a de quoi parler, de quoi dire : parfums (lavande, pins, iode...), échos (cigales, drisses claquant dans le port endormi...), couleurs, lumière...
Il aurait pu dire aussi : « Je peux vous dire tout de l’ambiance des soirs de Provence. »
Enfin problème dans le problème : la contradiction je peux/j’avais qui bancalise la phrase et détruit la pensée ; le coup de grâce donné à une phrase malade.
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* Discours « pour la [sic] stratégie sur [sic] la langue française » prononcé le 20 mars 2018 : http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/
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• 31 octobre 2018
Leçon 623. – Discours d’Emmanuel Macron à l’Institut de France*, compte rendu critique approfondi, 9/22
Phrases jetées, idées à développer, à préciser
— Emmanuel Macron est juste un banquier (et encore, ce n’est pas sûr, c’est plutôt un commercial), et il se croit un peu orateur, et même un peu poète, et même un peu éloquent.
— Il est probablement un canular** qui n’a pas encore été repéré ni dénoncé.
— Chacune de ses phrases est un nid de guêpes.
— Le pire dans tout ça, c’est qu’il aime parler, se montrer, philosopher, lantiponner devant un public nombreux : c’est avec un grand plaisir qu’il débite longuement (ici soixante minutes) toutes ces niaiseries, cette fausse littérature, ces maladresses d’idées, ces incohérences solennelles et qu’il s’écoute les dire et se les dire. Emmanuel Napperon napperonne, narcissique, sans lever les yeux sur le monde.
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* Discours « pour la [sic] stratégie sur [sic] la langue française » prononcé le 20 mars 2018 : http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/
Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
** « Canulars sociologiques » (v. l’affaire Alan Sokal entre autres) : https://www.franceculture.fr/emissions/le-journal-de-la-philo/canulars-sociologiques
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• 1er novembre 2018
Leçon 626/959. – Discours d’Emmanuel Macron à l’Institut de France*, compte rendu critique approfondi, 10/22
Orthographe
Cette leçon recense les principales fautes de graphie de la transcription du discours qu’on trouve sur le site Elysee.fr. Après les deux-points on trouvera nos corrections.
• Quelle place prétend-t-on leur donner ? : ... prétend-on...
• Ces pays [...] qui quoi que n’ayant jamais été officiellement francophones... : ... quoique...
• Les usages [...] dont on peut retracer l’histoire ou se perdre dans ses rais... : ... ses rets [mieux encore : ... les rets (faute d’orthographe + faute de syntaxe)]***
• La substance même de ce qui nous fait humain... : ... humains
• Je veux qu’elle retrouve toute sa place au dépens de succédanés : ... aux dépens...
• Il suffit de se rendre à l’étranger pour en mesure l’influence : ... pour en mesurer...
• Cette langue d’accès doit être ainsi assumée, présentée, expliquée comme celle qui permet de construire ces opportunités et donc enseigner : ... et donc [être] enseignée
• Le château ou l’Edit a été signé tombe en ruines : ... où l’Edit a été signé tombe en ruine
• Convaincu d’avoir connu la Creuse avant d’y être aller... : ... avant d’y être allé
• ne pas sombrer dans l‘aphasie [...] s‘ils ne sont pas Français [...] lorsqu‘on rentre le soir... : trois apostrophes mises à l’envers
• François 1er [deux occurrences] : Ier (double faute, soit quatre fautes)
• Faire vivre nos Francophonies au service des peuples... : ... nos francophonies...
• Essayer de dire qui était Francophone ou pas... : ... francophone...
• Il n’y a que les Français qui n’ont que le Français : ... qui n’ont que le français
Sans parler ni reparler des nombreux accents qui manquent sur les « E » des noms propres risiblement écrits tout en capitales** : Salah STETIE, abbé GREGOIRE, Louise LABE, Aimé CESAIRE, Dany LAFERRIERE, etc.
Et nous en passons de moins graves et nous reconnaissons qu’il y a moins de fautes que dans les transcriptions des discours de François Hollande sur Elysee.fr (cette affreuse vitrine de la langue française).
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* Discours « pour la [sic] stratégie sur [sic] la langue française » prononcé le 20 mars 2018 : http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/.
Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
** Même le mot Amazon est écrit tout en capitales : « Sur AMAZON, les livres en français occupent la troisième place »...
*** On nous fait remarquer justement que les rets ne peuvent être que ceux de l’histoire, qu’ils ne sont pas ceux de l’usage ; une formulation adéquate serait donc : « Les usages [...] dont on peut retracer l’histoire – à condition de ne pas se perdre dans ses rets ».
Merci à F.
• 1er novembre 2018
Leçon 627. – Discours d’Emmanuel Macron à l’Institut de France*, compte rendu critique approfondi, 11/22
Ponctuation
Cette leçon ne recense qu’une petite partie des fautes de ponctuation et de non-ponctuation de la transcription du discours qu’on trouve sur le site Elysee.fr.
Là où la virgule doit être supprimée nous avons mis un point rouge, là où une virgule manque nous avons ajouté un point bleu.
• L’objectif est qu’en 2022,• le réseau des écoles proposant des sections [...] regroupe 500 établissements
• C’est pourquoi je souhaite qu’en Europe,• soient enseignées deux langues
• Ce n’est pas cet espace incertain à la périphérie de la France• laquelle en serait le centre...
• Avant eux• des persécutés, des exclus, des déracinés avaient trouvé dans la langue française leur socle
• Je veux remercier madame Leïla SLIMANI• qui a conduit depuis plusieurs mois un travail considérable [noter : à la faute de ponctuation s’ajoute une faute de temps grammatical ; nous y reviendrons quand nous parlerons de la syntaxe macronienne]
• Vous me direz que• sur ce sujet, j’ai une forme de conflit d’intérêts
• Nous avons donc remis des maîtres, quelques règles [...] et réussi• je crois• à aussi remettre dans l’esprit de chacun...
• C’est tout cela• communiquer, échanger
• La formation des journalistes• qui sera doublée• en sera un pilier majeur...
• Enfin le français doit devenir cette langue qui raconte le monde de demain. Mieux, elle doit être cette langue qui crée le monde demain• et la création en français voilà notre troisième défi
Il est certain que, dans cette dernière citation, « la création en français » n’est pas un complément d’objet du verbe « crée » : il nous faut donc l’en séparer par une virgule afin d’échapper à une confusion ; sans cette ponctuation la phrase n’est qu’un charabia.
Persiste cependant et inévitablement le malaise que crée ce grossier matraquage, ce remplissage à coups de « cette langue qui raconte le monde », « cette langue qui crée le monde demain », « la création en français » ! Envolée lyrique ? on dirait plutôt d’une poule qui tente vainement de s’élever au-dessus du sol en caquetant. Quel mépris pour l’auditeur qui daigne vous entendre, pour le lecteur qui daigne vous lire ! Nous le disions dans la leçon 621 : chaque phrase est un désastre. Disons aussi que chaque phrase est une taie opaque tendue sur du vide.
Bidon, bidon, tout serait donc creux comme un bidon ? C’est à craindre. Attendons la suite pour conclure à coup sûr.
Pour mieux comprendre pourquoi ces ponctuations et ces non-ponctuations sont fautives, le lecteur pourra entre autres s’aider de nos sept leçons de ponctuation « Quel manuel de ponctuation ? » ici.
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* Discours « pour la [sic] stratégie sur [sic] la langue française » prononcé le 20 mars 2018 : http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/.
Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
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• 2 novembre 2018
Leçon 630. – Discours d’Emmanuel Macron à l’Institut de France*, compte rendu critique approfondi, 12/22
Un principe de politesse, À Rome, fais comme les Romains. Parlant sous la coupole et s’adressant principalement aux académiciens, le président (qui est le protecteur de l’Académie, comme l’a rappelé l’académicien Salah Stétié dans son discours de bienvenue au président) aurait pu, aurait dû se documenter afin d’éviter d’utiliser des mots qui n’existent pas dans le Dictionnaire de l’Académie et des anglicismes honteux que, soit dans son dictionnaire, soit dans sa rubrique « Dire, ne pas dire », l’Académie rejette et proscrit explicitement.
Mais, non, le président, qui veut passer pour un Malraux, a une trop haute idée de lui-même, de sa prose, de son pouvoir de séduction pour s’en soucier. Ce faisant, il a accumulé les gaffes.
Lexique : anglicismes et autres fautes de goût, 1/2
Ci-après quatre anglicismes proscrits utilisés par le président dans son discours.
• investir (deux fois)
Il nous appartient [...] de réinvestir certains lieux.
Sur le sens d’investir, voir la leçon 571, « Qu’est-ce qu’investir un lieu ? ».
• opportunité (quatre fois)
Il nous appartient [...] de refaire du français une langue par laquelle on accède à ces opportunités que j’évoquais.
• agenda (trois fois)
L’Académie a été conçue pour protéger la langue des coups de force inévitables de ceux qui veulent la soumettre à leur agenda politique ou dogmatique.
(Parmi ces « coups de force inévitables », l’anglo-saxonnisation de la langue, du monde, non ?)
• académique (deux fois)
Il nous faut en effet, à travers ces initiatives, promouvoir le français, les contenus en français, les contenus académiques, scientifiques et la présence de tous les locuteurs sur la Toile.
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* Discours « pour la [sic] stratégie sur [sic] la langue française » prononcé le 20 mars 2018 : http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/.
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• 3 novembre 2018
Leçon 631. – Discours d’Emmanuel Macron à l’Institut de France*, compte rendu critique approfondi, 13/22
Lexique : anglicismes et autres fautes de goût, 2/2
• Le monde bruisse de notre langue.
• Le monde en ce 20 mars bruisse de la langue française de façon presque vertigineuse.
À Rome, fais comme les Romains, disions-nous dans la leçon 630 ci-dessus.
Le verbe bruisser n’existe pas, seul existe bruire, qui fait « bruit » à la troisième personne du singulier de l’indicatif présent ; le Dictionnaire de l’Académie** l’ignore donc : « Le monde bruit de notre langue. » Littré et le Larousse en dix volumes de 1982 l’ignorent aussi : bruisser est un barbarisme récent.
Au passage, notons la risible exagération, le dérapage paresseusement contrôlé par un « presque » : « de façon presque vertigineuse ». Ah, la paresse d’expression ! c’est un peu comme manger ses crottes de nez.
Ce n’est pas à coups de mots rares (comme ces « écrits coruscants » d’Ahmadou Kourouma) ou forts qu’on obtient les meilleurs effets : il ne faut pas confondre la graisse et le muscle.
Si le président n’était pas l’ogre terrible et patient que nous (et bien d’autres) voyons clairement en lui, c’est de la pitié que nous ressentirions pour lui à l’écoute et à la lecture de ses discours et de ses déclarations.
Ogre terrible et patient : ajoutons follingue.
N. B. Parce que nous n’avons pas grande confiance dans les connaissances lexicales du président (qui, rappelons-le, n’est, selon nous, qu’un commercial, un tombeur de contrats), nous nous demandons s’il n’a pas voulu dire corrosif ou urticant plutôt que coruscant (« très brillant ») ; ou bien jeu de mots à la façon de François Hollande : Ahmadou Kourouma a écrit les Soleils des indépendances – et rien de plus coruscant que plusieurs soleils ; cependant, d’après les recensions et les extraits que nous avons lus, ce livre est corrosif, satirique, critique...
Mise à jour, janvier 2020. Eric Zemmour parlant de la réforme des retraites dit que Macron est un mégalomane, voilà qui est très bien vu ; nous disons qu’il est sang-suceur, un ogre et un révolutionnaire : les trois ne sont pas contradictoires, mais mégalomane nous semble le plus adéquat. D’autres termes blâmatifs*** conviennent au calamitant*** Macron, ils sont souvent implicites dans nos analyses.
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* Discours « pour la [sic] stratégie sur [sic] la langue française » prononcé le 20 mars 2018 : http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/.
Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
** Dictionnaire de l’Académie en ligne (de a à sabéisme) : https://academie.atilf.fr ou https://www.dictionnaire-academie.fr.
*** Enrichissement de la langue française, dictionnaire de mots nouveaux, « recueil de mots pris dans tous les écrivains modernes, dans [un] grand nombre d’orateurs distingués, [...] dans toutes les notabilités de la presse », de Jean-Baptiste Richard de Radonvilliers, 1842 ; téléchargeable à https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6487671p en formats PDF et texte.
• 3 novembre 2018
Leçon 632. – Discours d’Emmanuel Macron à l’Institut de France*, compte rendu critique approfondi, 14/22
Phrases jetées, idées à préciser
— Nous avons un doute affreux : ce discours est encore plus malade que nous ne le pensions. (C’est volontairement que nous passons du doute à l’affirmation.)
— Nous n’avons pour l’instant traité ou prévu de ne traiter que les problèmes qui sautaient aux yeux ; un vertige nous prend maintenant devant ce qu’il reste à faire. Noter que nous sommes sur ce discours depuis quelque 20 jours et que nous avons écrit plus de 18 000 signes de corvée citoyenne.
— Enfin, ce discours a-t-il été écrit ou en partie écrit par une machine comme le Pipotron ou par un logiciel un peu plus élaboré ? (Nous montrerons des ressemblances**.)
— Sans doute aucun la partie la plus dure et la plus longue à traiter du discours sera la partie charabia, dont nous n’avons encore presque rien dit. (C’est volontairement que nous ne mettons pas de virgule après « aucun ».)
— L’idée en nous fait boule de neige, se fait plus prégnante qu’Emmanuel Macron est un canular et que ses discours le dévoilent à qui est attentif (voir la note 623).
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* Discours « pour la [sic] stratégie sur [sic] la langue française » prononcé le 20 mars 2018 : http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/.
Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
** Déjà en juillet 2017 dans la leçon 257, nous avions, sans nommer la chose, pressenti une sorte de Pipotron ; en tout cas nous avions assez bien décrit son fonctionnement :
Curieuse, cette façon de jeter dans une phrase des idées sans se soucier qu’elles soient bien ordonnées, bien présentées et donc comprises, comme si seuls des mots ou des expressions isolés comptaient : « J’ai dit France, j’ai dit solidarité, j’ai dit fraternité, j’ai dit amour de la patrie, j’ai dit grandeur, j’ai dit bonheur, j’ai dit roman national, j’ai dit ardente responsabilité, j’ai dit ardente obligation, etc. ; j’ai dit les mots, les mots forts qu’il fallait dire, j’ai accompli ma tâche. »
• 4 novembre 2018
Leçon 633. – Discours d’Emmanuel Macron à l’Institut de France*, compte rendu critique approfondi, 15/22
Charabia et bouillie, 1/3
Avec nous, assistez à la confection d’une garbure**. Voici notre premier exemple : la garbure mijote dans les première et deuxième lignes et, trois lignes plus tard, elle est à point.
Le français s’est au fond émancipé de la France, il est devenu cette langue monde, cette langue archipel parce que d’autres langues se parlent dans des continents immenses et des centaines de millions de nos concitoyens la partagent mais il est peu de langues qui se parlent dans cet archipel monde qui est le nôtre.
Délicieuse bouillie !
Ajoutons ce détail : quelques lignes plus tôt, le poseur d’Amiens nous a déclaré...
C’est cela la francophonie, ce continent humain qui admet comme Constitution une grammaire partagée [...].
Nous voilà donc avec, sur les bras, une francophonie « continent humain » (deuxième citation) et un français à la fois « langue monde » (première citation) et « langue archipel » (première citation) dans « cet archipel monde qui est le nôtre » (première citation).
Les deux citations ci-dessus sont tirées des six premières minutes du discours, de soixante minutes : le signal est donné très tôt à l’auditeur qu’il va bâiller ferme, qu’il peut ouvrir un livre ou consulter discrètement son portable ; en effet, l’auditeur aura eu avant cela à affronter d’autres difficultés de compréhension, comme celle-ci...
Aujourd’hui partout sur la planète en ce jour ainsi choisi la langue française dit le monde et il faut la défaire des images qui ont fait qu’elle a pu un moment oublier de le dire.
Ben voyons !
Sylvain Fort, officiellement « conseiller discours et mémoire » (sic), c’est-à-dire entre autres nègre du président, est-il l’auteur ou un complice de cet audacieux bavardage ? on hésite à le croire. (Sur Sylvain Fort, voir la leçon 256 et cet article plein de griffes de la lionne Christine Tasin de décembre 2017 [archive : http://archive.is/FAUTE]).
Mise à jour du 31 décembre 2019. La méthode d’écriture Macron : selon le mal-écrivant*** Gala.fr, le président « “écrit douze versions [de ses discours] puis il réécrit tout. C’est un intuitif, il sent les choses et ce ne sont pas des discours qu’il commence à rédiger une semaine à l’avance”, confie un proche cité par Le Parisien » ; quant à son épouse, ex-professeur de français, elle relit attentivement ses allocutions de vœux.
Mise à jour du 17 janvier 2020. Sans surprise, Brigitte Macron a un parler relâché proche de celui de son mari : voir les vidéos à https://twitter.com/TF1LeJT/status/1218039165629104128. À côté d’elle, le journaliste Gilles Bouleau qui l’interroge est un modèle de langue et il ne ménage pas la présidente. Ecouter par exemple cette phrase de Brigitte Macron dans son contexte : « Je lui ai dit [au président] : “Tu es dans l’enceinte de l’Elysée, c’est compliqué de dire à un jeune homme une phrase comme ça”, mais je la comprends. » Et cette autre (à 31 s) : « Il n’a de cesse que la France » (traduction : il [le président] n’a d’autre préoccupation que la France).
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* Discours « pour la [sic] stratégie sur [sic] la langue française » prononcé le 20 mars 2018 : http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/
Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
** garbure : « soupe épaisse constituée de légumes, de choux, de tranches de pain de seigle, de jambon et de lard ou de confit d’oie ».
*** Mise à jour du 7 février 2020. « Mal-écrivant ». Voir par exemple cet article de Thomas Monnier du 6 février 2020 qui est un surprenant carnaval de fautes de style, de syntaxe, d’accord (« Macron [est] soucieux à ce que sa famille ne subissent pas ce mouvement de haine », etc.) : https://www.gala.fr/l_actu/22ews_de_stars/brigitte-et-emmanuel-macron-moques-au-carnaval-de-nice-ce-char-qui-va-faire-parler_442723 (archive : http://archive.ph/3TCbc). Une qualité cependant, pas de langue de bois quand l’auteur écrit en introduction d’article : « Emmanuel Macron plus impopulaire que jamais. » Audacieux pour un média qui a beaucoup à perdre à se fâcher avec les pipeuls. (La francisation orthographique du mot anglais people en exacerbe le ridicule, et c’est très bien.)
• 4 novembre 2018
Leçon 634. – Discours d’Emmanuel Macron à l’Institut de France*, compte rendu critique approfondi, 16/22
Le discours est présent en PDF sur le site de l’Institut français, mais les fautes (orthographe, syntaxe, ponctuation...) n’ont pas été corrigées : http://www.institutfrancais.com/sites/default/files/francophonie_discours.pdf [ Mise à jour de décembre 2019 : lien mort].
L’Institut français « est l’opérateur de l’action culturelle extérieure de la France. Il a été créé par la loi du 27 juillet 2010 relative à l’action extérieure de l’État et par son décret d’application du 30 décembre 2010 ».
Le fait de participer à la diffusion d’un pareil document s’appelle en termes grossiers « mettre de la m... dans le ventilo » – ce que nous faisons, certes, mais nous pour la bonne cause. Nous pouvons conclure que les tenanciers de l’Institut français n’ont pas lu le document.
L’Académie française a, elle aussi, mis sur la Toile le discours en PDF, mais elle a corrigé la plupart des fautes (elle a même supprimé ce passage dont nous avons parlé dans la leçon 626 ci-dessus : « dont on peut retracer l’histoire ou se perdre dans ses rais » ; comme l’auteur de la transcription d’Elysee.fr, les académiciens n’ont pas deviné qu’il s’agissait de « rets ») : http://www.academie-francaise.fr/sites/academie-francaise.fr/files/discours_de_m._emmanuel_macron.pdf.
Nous imaginons les académiciens entendant ce discours, retenant des soupirs ou levant les yeux au ciel et qu’à la lecture de la transcription certains ont fait des bonds formidables.
Ce discours est une incongruité et une mystification. Mystification, c’est le mot qui le peint le mieux.
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* Discours « pour la [sic] stratégie sur [sic] la langue française » prononcé le 20 mars 2018 : http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/ (PDF : https://www.elysee.fr/front/pdf/elysee-module-881-fr.pdf)
Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
• 5 novembre 2018
Leçon 635. – Discours d’Emmanuel Macron à l’Institut de France*, compte rendu critique approfondi, 17/22
Charabia et bouillie, 2/3
Parviendrons-nous à recenser toutes les occurrences de charabia dans le discours d’Emmanuel Macron, l’homme qui vend du vent aux éoliennes ?
La chose nous semble presque impossible, car à toute seconde soit nous donnons du pied sur une bosse, soit nous glissons dans un trou.
Dans les deux premières minutes (à 1 min 37 s) :
J’avais face à moi des jeunes étudiantes et des jeunes étudiants qui de manière évidente ne comprenaient pas ce que j’étais en train de dire ou plus exactement se disaient « il nous parle de quelque chose qui ne nous dit rien, il nous parle depuis un endroit ou depuis une langue qui ne nous dit pas la même chose ».
« Il nous parle depuis [...] une langue qui ne nous dit pas la même chose » : langue relâchée et illogisme, mais on comprend, on devine ce qu’a voulu dire l’auteur. Cependant...
... il nous parle depuis un endroit [...] qui ne nous dit pas la même chose
... là c’est pur charabia.
« Illogisme », disions-nous. « Une langue qui ne nous dit pas la même chose » : la même chose qu’à qui ?
Si je ne comprends pas une certaine chose et qu’une autre personne, elle, la comprend, je ne peux logiquement lui dire : « Vous comprenez différemment de moi » ; je ne peux que lui dire : « Vous comprenez, moi non. »
On appréciera aussi ce « ou plus exactement se disaient », qui introduit un développement qui au lieu d’éclairer obscurcit.
Tant de choses à dire... ! Quand plus haut nous disions qu’un vertige nous prenait devant ce qu’il reste à faire, vous commencez à voir, ô lecteur·trice citoyen·nne, que nous n’attigions pas ; on dirait bien d’un ado qui parle, ce président.
Devrons-nous nous contenter de n’exposer qu’un florilège, un cacolège, une sélection des pires ? ce serait peut-être dommage et pourrons-nous dire que nous avons bien fait notre travail et tenu notre promesse d’un « compte rendu critique approfondi » ?
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* Discours « pour la [sic] stratégie sur [sic] la langue française » prononcé le 20 mars 2018 : http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/.
Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
• 5 novembre 2018
Leçon 636. – Discours d’Emmanuel Macron à l’Institut de France*, compte rendu critique approfondi, 18/22
Charabia et bouillie, 3/3
Revenons un instant là-dessus :
Lorsque j’ai parlé francophonie c’est sans doute le moment où les malentendus se sont le plus installés. J’avais face à moi des jeunes étudiantes et des jeunes étudiants qui de manière évidente ne comprenaient pas ce que j’étais en train de dire ou plus exactement se disaient « il nous parle de quelque chose qui ne nous dit rien, il nous parle depuis un endroit ou depuis une langue qui ne nous dit pas la même chose ».
Familièrement on pourrait dire : « C’est la meilleure ! » Emmanuel Macron s’étonne que des étudiants africains ne comprennent pas ce qu’il dit ni de quoi il parle. « Mais, monsieur », aimerions-nous pouvoir lui répondre, « qui en Afrique ou ailleurs dans le monde, dont en France, qui comprendrait ce charabia désarticulé, ce flux de langue déstructuré, sans logique, sans consistance, sans contrainte et désinhibé** ? Vous faut-il quelque avis de plus que nos nombreuses et claires leçons – que vous ne lisez pas, je vous le concède – pour que vous preniez conscience enfin que votre langue est malade, et même gravement malade ? Dans ce cas, demandez un contre-diagnostic ».
Nous ajouterions :
« Et, à l’étranger, comment les interprètes se débrouillent-ils pour vous traduire ? Y pensez-vous ? Imaginez-vous leur stupéfaction, leur frustration, leur désarroi, leur enfer ? »
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* Discours « pour la [sic] stratégie sur [sic] la langue française » prononcé le 20 mars 2018 : http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/.
Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
** Désinhibition de langue qui est le signe supplémentaire d’une déconnexion par rapport au réel (il est peut-être inutile de rappeler ici que cette déconnexion du réel atteignit son maximum lors de la fête de la musique de 2018 à l’Elysée avec Kiddy Smile ; c’est sans doute à dater de cet événement que certains s’estimèrent autorisés à l’appeler familièrement Manu et à le tutoyer comme un des leurs).
[...]
• 9 novembre 2018
Leçon 643. – Discours d’Emmanuel Macron à l’Institut de France*, compte rendu critique approfondi, 19/22
Syntaxe, 1/3
La réponse m’a sans doute été donnée tout à l’heure par Gabriel FAYE qui nous disait que dans son Bujumbura natal quand on parlait de francophonie lui qui a montré à plusieurs reprises qu’il sait parler et écrire le français venait à l’esprit la photographie d’un président de la République française avec des présidents africains.
Pas raccord. Il aurait fallu dire « lui venait à l’esprit » ou « il lui venait à l’esprit » ou supprimer la phrase « qui a montré à plusieurs reprises qu’il sait parler et écrire le français », transformant ainsi un lui sujet (« lui qui a ») en lui complément (« lui venait à l’esprit » ou « il lui venait à l’esprit »).
Non corrigé sur le PDF de l’Académie (phrase reponctuée, mais faute de langue non rectifiée).
Cette phrase comporte d’autres problèmes, dont nous ne parlerons pas ou dont nous avons déjà parlé.
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* Discours « pour la [sic] stratégie sur [sic] la langue française » prononcé le 20 mars 2018 : http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/.
Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
• 9 novembre 2018
Leçon 644. – Discours d’Emmanuel Macron à l’Institut de France*, compte rendu critique approfondi, 20/22
Syntaxe, 2/3
• Ça n’est pas de cette image dont je suis venu aujourd’hui vous parler.
Il faut ici « de cette image que » (corrigé sur le PDF de l’Académie).
• Alors pour réussir ce récit, je veux remercier madame Leïla SLIMANI qui a conduit depuis plusieurs mois un travail considérable.
Il faut ici « qui conduit depuis plusieurs mois » ou « qui a conduit pendant plusieurs mois » (non corrigé sur le PDF de l’Académie).
• Je ne me suis pas essayé ici, sous le contrôle de plus experts que moi, à essayer de dire qui était Francophone ou pas.
Ce « s’essayer à essayer de » nous rappelle François Hollande et ses trop piteux « permettre d’être capable », « être capable de pouvoir », « permettre de pouvoir être possible », etc. (leçon 117). Il faut supposer que le président Macron improvise et ne lit pas son discours : une fois de plus, il ne se souvient pas de ce qu’il vient de dire ou ne s’en soucie pas, et il n’est donc pas raccord.
Deux de ces trois citations comportent d’autres problèmes, dont nous ne parlerons pas ou dont nous avons déjà parlé.
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* Discours « pour la [sic] stratégie sur [sic] la langue française » prononcé le 20 mars 2018 : http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/.
Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
• 10 novembre 2018
Leçon 645. – Discours d’Emmanuel Macron à l’Institut de France*, compte rendu critique approfondi, 21/22
A signaler, aucun « en même temps » dans ce discours.
Un article gentillet sur ce tic de langage du président : http://www.leparisien.fr/societe/tics-de-langage-en-meme-temps-le-peche-mignon-de-macron-21-04-2018-7676160.php.
D’où nous extrayons ceci :
« Désormais, le public, les auditeurs, les téléspectateurs attendent le moment où il va prononcer cette locution adverbiale. C’est astucieux car ils n’en écouteront que mieux le discours », souligne l’essayiste Michel Le Séac’h, spécialiste de la communication politique.
« “C’est astucieux”, souligne l’essayiste » !... Cet astucieux et ce souligne sont parfaitement ridicules et parfaitement creux.
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* Discours « pour la [sic] stratégie sur [sic] la langue française » prononcé le 20 mars 2018 : http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/.
Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
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• 14 novembre 2018
Leçon 649. – Discours d’Emmanuel Macron à l’Institut de France*, compte rendu critique approfondi, 22/22
La langue, la parole est une arme puissante avec laquelle Emmanuel Macron se tire moult balles dans le pied et flingue le décor.
Syntaxe, 3/3
• Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames et Messieurs les Académiciens,
Madame la Représentante personnelle pour la francophonie,
Mesdames et Messieurs,
C’est avec beaucoup d’humilité que je viens...
Par « Madame la Représentante personnelle pour la francophonie », le président salue sa représentante personnelle Leïla Slimani – présente parmi l’auditoire –, c’est donc « Madame ma représentante personnelle » qu’il eût fallu dire (ou simplement « Ma représentante personnelle » si le protocole l’autorise) ; la formule « Madame la Représentante personnelle » est en effet incomplète : la représentante personnelle de qui ?
Un autre orateur aurait pu dire : « Madame la représentante personnelle du président de la République pour la francophonie ».
• Et c’est fort de cela qu’aujourd’hui des centaines de millions de personnes affrontent le monde.
La transcription d’Elysee.fr est conforme à l’audio du discours, mais il eût fallu « fortes ».
L’Académie a corrigé dans son PDF (ce n’est que mettre la poussière sous le tapis, diront les mauvaises langues).
Mise à jour de juillet 2019. L’analyse de ce Radeau de la Méduse oratoire n’est pas terminée, et on en trouvera deux suites dans les leçons 882 à 890 ci-dessous, suites qui sont loin d’épuiser le sujet.
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* Discours « pour la [sic] stratégie sur [sic] la langue française » prononcé le 20 mars 2018 : http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/.
Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
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• 12 juillet 2019
Leçon 882. – L’automne de Macron, 1/9, Macron pas dans les temps
Poursuite de la relecture partielle du site.
Macron a aussi un problème avec les temps du verbe, problème de logique une fois de plus.
J’ai très sincèrement cru pouvoir décrire l’automne grâce à Colette et je peux vous dire tout de la chaleur des soirs de Provence parce que j’avais lu Giono.
Correction : ... je pouvais vous dire tout de la chaleur des soirs de Provence parce que j’avais lu... ou je peux vous dire tout de la chaleur des soirs de Provence parce que j’ai lu...
A l’instant, je me souvenais avec émotion de ce que Madame de Staël disait parfois.
Correction : A l’instant, je me souviens... ou Il y a un instant, je me souvenais...
Homme qui louvoie n’est pas si décidé que ça.
• 17 juillet 2019
Leçon 883. – L’automne de Macron, 2/9
Nous poursuivons la relecture partielle de notre site et nous revenons sur le désastreux discours « pour [sic] la stratégie sur [sic] la langue française » prononcé par Macron le 20 mars 2018* à l’Institut devant, entre autres, un parterre d’académiciens.
Revoyons la transcription officielle du site Elysee.fr* de la conclusion de ce discours de 1 h 4 min 6 s jusqu’à la fin :
Au fond, du plus loin que je me souvienne, j’ai éprouvé des sentiments en les lisant peut-être avant de les vivre. Je suis convaincu d’avoir connu la Creuse avant d’y être aller [orthographe sic], à cause de Pierre MICHON [c’est plutôt grâce à que à cause de]. J’ai très sincèrement cru pouvoir décrire l’automne grâce à Colette et je peux vous dire tout de la chaleur des soirs de Provence parce que j’avais lu GIONO. C’est ça le français et ça, ça exige en effet beaucoup d’heures d’apprentissage, ça exige de se tromper, de traduire et retraduire, ça exige tout ce que je viens de vous dire, mais ça n’enlève rien de la part intime que chacune et chacun d’entre vous a avec le français, et qui est irréductible. Et au fond, c’est ça le trésor de notre langue, c’est ça la richesse de votre Académie et c’est ça la beauté du combat que nous continuerons à mener ; c’est que le français ne sera jamais une langue hégémonique, parce que c’est une langue de combat et d’intranquilité [orthographe sic], parce qu’il continuera à être une langue de traduction et d’étymologie et parce qu’on aura beau écrire des dictionnaires, il faudra continuer à les refaire. Je vous remercie.
« C’est plutôt grâce à que à cause de » : encore la haine de la répétition, ou quand l’élégance prime le sens (v. plus loin « grâce à Colette »).
1. — D’abord, soulignons deux des différences entre ce que dit Macron (écouter la vidéo*) et la transcription d’Elysee.fr ci-dessus.
Oral (ce qu’il dit)/transcription (ce qui est écrit) :
— Je suis convaincu d’avoir connu la Creuse avant d’y être/... avant d’y être aller [orthographe sic]
— ... parce que c’est une langue de combat et d’intranquilles/... d’intranquilité [orthographe sic]
Macron s’écoute parler : en oublie-t-il, hypnotisé par son propre ramage, le sens de ce qu’il dit ?
2. — La voix
Petite voix émue, douce, triste, confidentielle, mourante, lente, hésitante parfois (oui, l’orateur contient son émotion... oui, l’orateur recherche enfouies dans son âme des vérités qui vont certainement nous intéresser... oui, il recherche la formulation exacte et difficile de ces vérités, de ces vérités sincères, non feintes, parfaitement réelles... il ahane, enfin il accouche, et se livre ; il livre des secrets à son auditoire... pour nous, devant nous il rappelle à la vie de vieilles sensations... oh, l’être sensible, humain et émouvant... finalement l’orateur et l’auditoire communient...).
« Finalement l’orateur et l’auditoire communient » : Macron conclut par un « Je vous remercie ». Mais non ! avons-nous envie de lui dire, c’est nous qui vous remercions, c’était beau, c’était vrai.
3. — Analyse partielle
Passons sur ces deux « au fond » suspects de n’avoir rien de profond ni de pesé, sur le « Je suis convaincu » et sur le « J’ai très sincèrement cru », qui participent à donner de la crédibilité au texte (oui, c’est du vécu, et rien n’est inventé par Macron) et sur plusieurs obscurités ou maladresses du texte (comme ce « j’ai éprouvé des sentiments en les lisant peut-être avant de les vivre » : lit-on des sentiments ou lit-on leur description ?), obscurités ou maladresses que nous avons en partie analysées dans les leçons 620, 621 et 882 ci-dessus, passons également sur les carences de la ponctuation de la transcription ; passons donc sur tout ça pour analyser cette seule phrase :
J’ai très sincèrement cru pouvoir décrire l’automne grâce à Colette.
Extrait audio de vingt-sept secondes de « Au fond, du plus loin que je me souvienne » à « grâce à Colette » : ici.
N. B. Nous appelons transcription ce qui n’est peut-être que le texte du discours qu’était censé lire le président, d’où les différences entre l’écrit et l’oral ; cependant l’incident du « miguet » (en quatre leçons à partir de la leçon 822) nous fait penser le contraire et « transcription » est bien le terme utilisé par Elysee.fr. Une certitude, si c’est une transcription, elle n’est pas exacte et rigoureuse.
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* Discours complet, vidéo et transcription, à http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
• 17 juillet 2019
Leçon 884. – L’automne de Macron, 3/9
Reprenons :
J’ai très sincèrement cru pouvoir décrire l’automne grâce à Colette.
Mille diables ! mais que peut bien signifier pareille phrase ?
D’abord précisons ce qui suit. « J’ai très sincèrement cru » : il s’agit ici pour Macron de clamer sa sincérité envers soi-même, et non envers son auditoire (Macron est préoccupé par les deux formes de la sincérité, envers les autres et envers soi, car il a un grand besoin qu’il se croie pour qu’on le croie, mais sent-il que de moins en moins d’auditeurs sont dupes de son petit théâtre bancal au plancher inégal partout grinçant et prêt à fuir sous lui ?).
Toutefois, sachant Macron peu fin dans l’expression, nous pouvons le soupçonner d’avoir plus probablement voulu dire : « Je vous le dis très sincèrement, j’ai cru pouvoir décrire l’automne grâce à Colette » – nuance, mais l’affirmation n’en reste pas moins farfelue, comme nous le montrerons tout à l’heure.
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Discours complet, vidéo et transcription, à http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
• 17 juillet 2019
Leçon 885. – L’automne de Macron, 4/9
Reprenons :
J’ai très sincèrement cru pouvoir décrire l’automne grâce à Colette.
Rappelons que Macron parle de ses jeunes années.
Force est de conclure que, à l’âge où Macron était capable de lire Colette, à l’âge de dix ou onze automnes, il n’était pas capable de décrire la saison qui suit l’été et précède l’hiver. Incroyable, non ?
Il n’y aurait donc pas d’automne à Amiens, dans ses rues, dans ses parcs, dans ses jardins ni dans ses environs de campagne ?
Certes il l’aurait moins bien décrit que ne l’aurait fait Colette, mais il aurait pu le décrire. Donc pure invention, propos creux, et le « très sincèrement » était supposé donner de la crédibilité à cette fable grossière.
Mais, mille diables et mille tonnerres ! il y a pire dans cette phrase, c’est son « j’ai cru [...] pouvoir ».
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Discours complet, vidéo et transcription, à http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
• 17 juillet 2019
Leçon 886. – L’automne de Macron, 5/9
Cette voix fluette qui mendie nous fait penser que ce discours est un exercice d’aplatissement devant les académiciens visant à gagner leur approbation ou leur neutralité – plus probablement leur neutralité, bien plus facile à obtenir.
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Discours complet, vidéo et transcription, à http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
• 17 juillet 2019
Leçon 887. – L’automne de Macron, 6/9
Revenons à nos moutons.
Macron déclare sur un ton confidentiel et pénétré :
J’ai très sincèrement cru pouvoir décrire l’automne grâce à Colette.
Du consternant « j’ai [...] cru pouvoir décrire l’automne » il découle que, après avoir lu Colette, Macron n’en était toujours pas capable ou, au mieux, qu’il n’était pas sûr d’en être capable.
On croit rêver, non ?
Cette question parmi d’autres nous brûle les lèvres : y a-t-il une nécessité quelconque d’être capable de décrire l’automne ? est-ce un prérequis à quelque chose, un passage obligé pour accéder à quelque chose d’important ?
Un Macron plus crédible se serait contenté de dire : « J’ai compris l’âme de l’automne grâce aux descriptions de Colette », « Je suis tombé amoureux de l’automne grâce aux descriptions qu’en fait Colette »... ; il aurait même pu ajouter un « Je vous jure que » au début de ces deux phrases sans que cela ressemblât à du remplissage.
Homme artificiel et superficiel, lancinante crécelle à fadaises, frimeur toujours satisfait, naïf au fond, on dirait un gamin qui s’essaie à égaler quelque poète ou quelque grand écrivain et nous dirons de ses discours comme de ceux de Hollande : que de temps passé à débiter des balourdises, que de temps perdu pour notre pays si malade !
Il faut peut-être aujourd’hui reconnaître une qualité à Hollande, il ne faisait pas le beau sur une scène à cent millions de spectateurs potentiels à travers le monde, il ne s’écoutait pas parler en se régalant, il ne se faisait pas graver ses discours dans le marbre pour les distribuer à ses amis (ce n’est peut-être pas la réalité, mais nous imaginons sans peine cette scène : Macron comme Benito Mussolini offrant chaque année à son épouse pour son anniversaire une photo dédicacée de lui-même*).
Quand nous avons commencé dans la leçon 588 l’étude du discours de Macron à l’Institut de France, étude que nous avons poursuivie sur vingt-deux leçons sans parvenir à épuiser la matière (elle est quasiment inépuisable), nous avons déclaré à la huitième leçon : « Chaque phrase est un désastre » ; le lecteur voudra bien reconnaître que nous en avons donné cent preuves et que nous n’exagérions pas. Nous pourrions en donner d’autres si l’exercice en valait la peine.
Cependant nous n’en avons pas fini avec l’analyse de ces dix lignes d’extrait.
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* Selon Rachele Guidi elle-même, épouse de Mussolini.
• 17 juillet 2019
Leçon 888. – L’automne de Macron, 7/9
La toute fin de la conclusion décourage les commentaires, comme en général toute prose macronienne :
C’est ça le français et ça, ça exige en effet beaucoup d’heures d’apprentissage, ça exige de se tromper, de traduire et retraduire, ça exige tout ce que je viens de vous dire, mais ça n’enlève rien de la part intime que chacune et chacun d’entre vous a avec le français, et qui est irréductible. Et au fond, c’est ça le trésor de notre langue, c’est ça la richesse de votre Académie et c’est ça la beauté du combat que nous continuerons à mener ; c’est que le français ne sera jamais une langue hégémonique, parce que c’est une langue de combat et d’intranquilité [orthographe sic], parce qu’il continuera à être une langue de traduction et d’étymologie et parce qu’on aura beau écrire des dictionnaires, il faudra continuer à les refaire. Je vous remercie.
Ce qui est particulièrement incompréhensible :
mais ça n’enlève rien de la part intime que chacune et chacun d’entre vous a avec le français, et qui est irréductible
Ici un contresens :
ça exige de se tromper
Contresens en effet, puisqu’il fallait dire « ça implique de se tromper ».
Ici deux faux-sens :
on aura beau écrire des dictionnaires, il faudra continuer à les refaire
« À refaire », non, pesant et vilain faux-sens ; à actualiser ou à mettre à jour, oui.
Et que vient faire ici cet « on aura beau » ? Rien ! ce n’est pas du tout la locution adéquate. Il fallait simplement rappeler que les dictionnaires ne sont pas écrits une fois pour toutes, qu’il faut sans cesse les actualiser (nouveaux mots, nouvelles acceptions...) et prendre opportunément comme exemple le travail d’actualisation en cours du Dictionnaire de l’Académie. Cette phrase est probablement une allusion ratée avec des mot ratés.
Par l’obscure formule le français langue d’étymologie, il faut probablement comprendre que le français a été et restera l’objet de nombreux emprunts, vision optimiste puisque les langues étrangères n’empruntent plus qu’à l’anglais, la France et sa langue n’étant plus qu’un cadavre sur lequel financiers et politicards s’affairent à arracher les dernières dents en or.
Et cetera.
En résumé : la fin déglinguée d’un déglingué discours.
————
Discours complet, vidéo et transcription, à http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-a-l-institut-de-france-pour-la-strategie-sur-la-langue-francaise/Archive : http://archive.is/2eyok (2018) [ou https://archive.ph/ZZA2n (2022)].
• 17 juillet 2019
Leçon 889. – L’automne de Macron, 8/9
J’ai éprouvé des sentiments en les lisant peut-être avant de les vivre.
Connaître la Creuse, pouvoir décrire l’automne, pouvoir dire tout de la chaleur des soirs de Provence : quel rapport avec des « sentiments » ?
Une formulation comme celle-ci eût été plus logique : « J’ai connu par la littérature certaines réalités avant de les voir » — ce qui n’a absolument rien d’extraordinaire, à part, bien sûr, la phrase sur l’automne, qui reste une grosse farce.
Rappelons ce lire des sentiments, expression inadéquate épinglée plus haut (leçon 883).
Le mot sensation eût été bien préférable au mot sentiment, mais lit-on des sensations ? non plus !
Enfin, et c’est pour nous une occasion de le dire, rien ne nous semble plus étranger à l’apprenti séducteur Macron que les sentiments (malgré ses déclarations d’amour ardentes et pittoresques ; v. les leçons 579 et 806 : « parce que j’aime chaque enfant de la République », « parce que je veux être président, je vous ai compris et je vous aime »).
Fatras d’élucubrations, collisions sans fin d’illogismes et d’approximations, complet désastre inaperçu.
• 18 juillet 2019
Leçon 890. – L’automne de Macron, 9/9
Les discours de Macron heurtent douloureusement le sens commun, jettent le trouble, l’incompréhension dans l’esprit de l’auditeur, qui, à tort, doute de son propre bon sens.
Combien de gens humbles ou modestes préfèrent souscrire à la théorie du fin lettré à la pensée complexe et renoncent à douter des capacités d’expression du président !
Combien de gens n’osent pas dire que le roi Macron est nu, et qu’il est, comme nous le disions dans la leçon 623 et le réitérions dans la 632, un canular ?
— Abrutir le peuple en l’habituant à entendre et à accepter des discours incohérents dont aucun intellectuel ne récuse ni même ne met en doute la rationalité, par conséquent faire douter le peuple de sa capacité à analyser.
— Dominer le peuple en usant du petit prestige qu’a encore la fonction de gouvernant, domination d’autant plus facile que l’école éduque de moins en moins les élèves à la raison, ne leur donne plus suffisamment d’outils pour penser, pour s’exprimer et pour acquérir une autonomie intellectuelle.
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• Le style c’est l’homme, analyse de l’expression macronienne ici
• Lesdites « Rectifications de l’orthographe » de 1990, analyse d’un cafouillage ici
• Le style déplorable des historiens ici
• Le piège de la locution « sauf à » ici
• Discours de Macron à l’Institut de France, compte rendu critique approfondi ici
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